À peine annoncé, le plan monumental et historique d’économies annoncées par le nouveau Premier-Ministre Manuel Valls a déjà fait grincer des dents. Récemment, un sondage a montré que les mesures proposées étaient plus acceptées à droite qu’à gauche. Le journal Le Monde a même démontré que celles-ci se plaçaient plus à droite que les mesures d’austérité décidées par le gouvernement Fillon.
Une mise en péril d’une économie déjà bien mal au point
Si cette austérité drastique décidée par Manuel Valls est saluée par les libéraux, de nombreux économistes mettent en garde le gouvernement contre une mise en danger de l’économie française. En résumé, le Pacte de Responsabilité prévoit d’alléger les charges et impôts qui pèsent sur les entreprises de 30 milliards d’euros. En contrepartie, le Gouvernement prévoit de diminuer d’autant les prestations sociales et dépenses publiques.
Ce seront donc 30 milliards qui verront directement les comptes de nos entreprises s’améliorer, ce dont se réjouissent de nombreux observateurs. Mais certains tirent la sonnette d’alarme : ces 30 milliards vont être ponctionnés sur le pouvoir d’achat des ménages, et notamment les ménages les plus modestes, puisque ce sont les prestations sociales – par nature touchées par ces ménages les plus pauvres – qui vont être diminuées.
Moins de coûts pour les entreprises, mais aussi moins de chiffre d’affaires
Or, il est établi que les ménages les plus pauvres ont la propension à consommer la plus élevée, c’est-à-dire que ce sont eux qui dépensent la plus grosse partie de leurs revenus, les ménages aisés ayant tendance à épargner une plus grande partie de leurs rentrées d’argent. Les entreprises risquent donc fort de voir la consommation, et donc leur chiffre d’affaires, diminuer d’autant.
Le calcul est simple : les entreprises vont dépenser 30 milliards de moins, mais vont enregistrer 30 milliards de moins de recettes, ce qui aura un impact nul sur leurs comptes. Par contre, les liquidités injectées dans l’économie dite « réelle » vont drastiquement diminuer, les inégalités augmenter et du coup l’économie française se fragiliser encore plus.
Droit dans le mur
Ce cercle vicieux entretenu depuis quelques années en Europe pour des raisons idéologiques a peu à peu relégué notre continent au rôle de vieillard malade du monde. L’Europe est l’une des seules zones à se plier de bon cœur au libre-échange mondial, là où nos voisins et partenaires pratiquent tous des politiques protectionnistes agressives. Il est impossible par exemple de vendre un train au Brésil sans le construire là-bas. Il est impossible de signer un contrat avec la Chine sans y avoir une joint-venture sur place.
Étant les seuls à jouer le jeu du libéralisme, nous sommes également les seuls à bien nous faire avoir dans cette compétition économique mondiale. Notre historique et les combats des travailleurs depuis plus d’un siècle ont amené notre pays à un haut niveau de vie. Ce niveau de vie n’est pas compatible avec des règles d’échanges dérégulées à travers le monde.
Des États européens qui luttent contre des États européens
Au lieu de lutter contre les États-Unis, la Chine ou les pays émergents, l’Europe lutte contre elle-même. Diminuer le « coût » du travail en France de 1 ou 2 points n’aura pour impact que de renforcer notre concurrence avec les autres pays européens. La France a un coût horaire du travail légèrement inférieur à l’Allemagne, similaire à la moyenne européenne. Diminuer ce coût équivaut à se battre contre nos voisins pour leur prendre des parts de marchés, car, sur ce plan, jamais nous ne serons concurrentiels face aux salaires chinois ou philippins.
Un mauvais combat
François Hollande mise tout sur son Pacte de Responsabilité pour améliorer sa situation personnelle dans l’optique de l’élection présidentielle de 2017. Au-delà du fait que notre pays est à nouveau sclérosé par cette échéance présidentielle quinquennale qui se transforme à chaque fois en drame où le pays se retrouve au bord du gouffre, cette posture est tout-à-fait grotesque.
Le pire, c’est que le Président croit sincèrement qu’injecter 30 milliards dans les comptes des entreprises va créer de l’emploi massivement. Il faut rappeler qu’un SMIC mensuel coûte 1 633 euros à une entreprise, soit un petit 20 000 euros par an. 30 milliards représentent donc 1,5 millions de SMIC. Si on voulait créer de l’emploi, il aurait donc été plus économique pour l’État de les financer directement. Mais passons…
Il faut revoir nos priorités
La plupart des politiques basent leurs objectifs sur des taux de croissance ou d’emploi. C’est se tromper de combat ! Ce qui compte pour estimer si une politique est une réussite ou non, c’est le bonheur engendré chez les citoyens.
Le taux de croissance n’est qu’un chiffre. C’est ses conséquences qui sont importantes. De même, notre taux de chômage n’est qu’un chiffre. Travailler, ce n’est pas le but d’une vie, surtout si ce travail se fait à bas salaire et n’est pas épanouissant. Ce que veulent les citoyens, ce n’est pas l’emploi, c’est le salaire. Ce qu’ils veulent, c’est vivre, vivre bien, et heureux. La course à l’emploi à tout prix entraînera des absurdités comme la baisse des salaires.
Cela fait des années qu’on essaye. Cela fait des années qu’on échoue. Il est temps de changer de modèle.
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