Pour changer de la routine en cet été 2013, j’ai invité plusieurs belles plumes, blogueurs, twittos, à contribuer à ce blog en écrivant un billet de 365 mots. Les retours ont été très positifs, au-delà de mes espérances. C’est donc avec plaisir que je vous invite à les découvrir, chaque mercredi en juillet et en août.
Pour cette troisième contribution à la rubrique « Invités sur 365 mots », je vous invite à lire la contribution de Nicolas Jégou. Blogueur politique incontournable, de gauche, il a clairement affiché son soutien à François Hollande durant la campagne présidentielle. Habitué des billets collant à l’actualité, Nicolas a accepté de contribuer à notre rubrique estivale.
Jégoun : le printemps des réacs
Le mois de juin a été celui des réactionnaires, dans les réseaux sociaux. Entre la mort de Clément Méric, le score important du Front National à l’élection partielle de Villeneuve-sur-Lot et la condamnation à deux mois de prison de Nicolas B., ce jeune qui avait participé à une manifestation non autorisée et s’était rebellé face aux forces de l’ordre. Tout cela avait suivi six mois de débat sur le mariage pour tous.
Les blogs proches de l’UMP sont assez peu nombreux. Par contre, on trouve beaucoup de blogs de citoyens de droite qui ne sentent plus pisser et s’estiment dans une mouvance majoritaire, perdant toute objectivité. Méric, par exemple. Nos blogueurs sont entrés dans une défense d’une espèce de fasciste sans même se rendre compte qu’il n’a pas à être défendu. La justice est là pour faire la vérité. En défendant « Estéban », ils en sont venus à faire un procès à Méric, le méchant « antifa » en oubliant qu’« antifa » était l’abréviation d’antifasciste, ce qui nous le rend tout de suite plus sympathique (et pas nécessairement plus intelligent).
Avec Nicolas B., ils ont entretenu une confusion avec d’autres affaires de justice sans le moindre rapport, le tout en niant la gravité des faits commis par ce garçon : il a tout simplement empêché pour la deuxième fois en trois semaines les forces de l’ordre de faire leur boulot, montrant qu’il n’avait rien compris à un précédent jugement.
Avec le bon score du jeune candidat du Front National, nos blogueurs réactionnaires ou d’une droite plus modérée se foutent, à juste titre, du Parti Socialiste mais, plus étrangement, sont à peu près unanimes : l’UMP est nulle et quasiment seule responsable de ce bon score.
Néanmoins, le blogueur réactionnaire commet souvent la même erreur : il se pense majoritaire. L’un d’entre eux disait que la gauche devait changer de discours pour séduire cet électorat sans même se rendre compte que la gauche veut faire une politique de gauche et pas tenir un discours d’extrême droite pour attirer les voix. Le réac n’est pas majoritaire. L’effet de meute créé par les urnes et les résultats de quelques partielles sont trompeurs. Ce qui ne veut pas dire que le PS et l’UMP sont en grande forme.
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3 Responses to “L’invité de la semaine : Jégoun / Le printemps des réacs”
17 juillet 2013
NicolasExcellent billet ! C’est rare dans ce blog ! (Smiley, hein !).
18 juillet 2013
TomQuelques remarques en réaction à ce post.
– Utiliser le terme « réactionnaire » est loin d’être neutre. C’est un terme qui disqualifie aussitôt celui que l’on nomme ainsi: or peu de gens se revendiquent réactionnaires, parce qu’on a tendance à parler de « vieux réac » ou de « con de réac ».
Dans l’imaginaire de gauche, le réac est un vieux schnock aux idées dépassées (voir rancies), que l’on préfère ignorer, à moins qu’il exprime ses opinions, auquel cas on se mettra à le qualifier de fasciste (le Nouvel Obs a démontré avec sa Une sur les « néo-fachos » que des gens de gauche n’hésitent pas à transformer le « réac » en « facho » si l’occasion s’en présente).
Le réac est tout juste bon à garder ses idées pour lui et à la fermer, car il ne va pas dans le « sens de l’histoire ». L’air de rien, qualifier des conservateurs (avec toutes les nuances et opinions différentes qu’implique le conservatisme) de réactionnaires, c’est les exclure du débat démocratique, au moins symboliquement.
Et ce d’autant plus que la gauche a tendance à agiter « la Réaction » comme un épouvantail, de la même façon qu’on agite la Révolution pour effrayer le bourgeois.
– Sur l’affaire Méric, la tendance de certains à minimiser l’affaire est simplement une réponse à la récupération politique grossière faite par le Front de Gauche et les antifas (parce que oui, les antifas ont pleuré la mort de leur camarade, mais ont aussi utilisé sa mort à leurs propres fins idéologiques, de façon prévisible mais peu glorieuse).
Le fait qu’il soit « antifasciste » a justement été une protection inébranlable contre toute critique: aux yeux d’une partie de la gauche, peu importe qu’il ait cherché la bagarre, la cause était juste, donc toutes ses actions sont légitimes. On nous a aussi sorti le grand refrain sur le « retour du fascisme » à partir de ce qui était une bagarre de vue entre deux bandes rivales, et non pas un assassinat prémédité.
Si la mort de Clément Méric semble être minimisée, c’est en réponse à un événement tragique dont la signification a été surinterprétée.
– Nicolas B. a fait preuve d’une véritable arrogance lors de ses procès, alors qu’il n’a rien d’un prisonnier politique. Notons cependant que s’il a d’abord été condamné à une peine de prison ferme, c’est à cause d’un nouvel arsenal législatif mis en place sous Sarkozy: l’épisode aura au moins permis de montrer le côté ubuesque de ces sanctions pénales contre le refus de décliner son identité et de subir un contrôle ADN.
De façon plus générale, les arrestations arbitraires de participants à la « Manif pour tous » (ou de simples porteurs de sweat-shirts de la Manif pour tous) ont été assez nombreuses pour que, sans crier à la « dictature socialiste », on puisse considérer qu’il y a eu des dérives policières graves (comme le rappel à l’ordre du Conseil de L’Europe à l’égard du gouvernement français a pu le démontrer).
– On ne demande pas au PS de reprendre à son compte le discours du FN. Je constate simplement que le PS a toujours refusé le droit d’inventaire du 21 avril 2002, et a beaucoup de mal à se remettre en cause sur les questions d’immigration et de sécurité.
Personne ne demande au PS de devenir un FN bis, mais un peu d’autocritique ne lui ferait pas de mal.
Je ne sais pas si les réacs sont majoritaires, mais il est difficile de nier que certaines de leurs idées sont partagées par la majorité des Français, en témoignent quelques sondages récents sur l’opinion des Français en termes d’immigration.
Désolé, je viens d’écrire un commentaire aussi long que cet article, ce qui est un peu tricher compte tenu du nombre de mots qui vous est imposé. Toutes mes excuses…
19 juillet 2013
NicolasTom, ton commentaire n’est pas aussi long il est beaucoup trop long.
Dans ma bouche, le terme réac n’est pas péjoratif. Une grande partie des coentateurs de mon blog sont des reacs revendiqués.
Pour le reste prends donc du recul plutôt que de te mettre sur la défensive : le billet porte sur les reacs pas sur la gauche.
C’est un fait : les blogueurs reacs ont tapé sur Méric pour défendre l’autre. C’est à pisser de rire.
Quant à Nicolas B, il n’a pas été condamné une première fois à de la prison ferme mais une deuxième fois : il avait déjà été condamné quelques semaines (2) pour des faits similaires. La réaction de la justice a donc été parfaitement normale et il a passé 3 semaines en prison.
Les idées des reacs ne sont pas partagées par la majorité des français : la majorité souhaite que ces débats cessent.
Ainsi, tu viens de sortir un nombre incroyable de contrevérités : c’est très drôle.