Bonjour, je m’appelle Frédéric, j’ai 43 ans et mon métier c’est d’être conducteur de métro. Chaque jour, je fonce durant tout mon service à travers les galeries sombres du métro parisien, transportant des milliers de passagers d’une station à l’autre. Vous êtes sûrement très nombreux à vous demander ce qui peut bien se passer dans la tête d’un homme comme moi. J’imagine que dans la vôtre, je dois être quelque chose comme une fourmi, ou une bestiole du genre, vivant sous terre une bonne partie de la journée, alors que votre objectif à vous, lorsque vous prenez le métro, est de retrouver l’air frais de la surface au plus vite.
Serge Gainsbourg a chanté le métier de poinçonneur, aujourd’hui disparu, pensant certainement qu’il était plus intéressant de s’arrêter sur une profession suscitant encore plus de circonspection que la mienne. De fait, personne ne s’est jamais réellement penché sur notre cas. Les seuls moment où nous faisons la une des journaux, c’est quand nous sommes en grève. Bien que je ne fasse jamais grève, c’est moi qui me fais houspiller ces jours-là, car je suis là, et pas les grévistes.
Ma situation est assez paradoxale et problématique. En effet, je suis une des rares professions visibles du grand public à avoir un rapport aussi contrarié avec lui. Je transporte des gens qui n’ont qu’une hâte, c’est de sortir au plus vite de mon train. Alors j’essaye d’apporter un peu de chaleur à ces grises mines en faisant quelques blagues au micro, en ayant une voix la plus enjouée possible, et souvent ça fait mouche. Mais le service que je rends aux gens leur est nécessaire mais pénible. Les dentistes doivent ressentir la même chose : soulager son client, mais sentir qu’il aimerait mieux ne pas être là. Cruel sentiment : le devoir accompli sans voir dans leur visage la moindre parcelle de remerciement. Mais après tout, me direz-vous, c’est mon métier !
Alors je trace ma ligne, serpentant dans les tunnels de ma ligne, sans jamais d’autre issue que ma ligne, sans jamais pouvoir me mesurer à mes collègues. Imaginez si l’on pouvait faire partir deux métros en même temps, et se faire la course, voir lequel arrive en premier, salué par la clameur de la rame en délire… Un rêve de conducteur de métro.
2 Responses to “Je suis conducteur de métro”
20 avril 2015
MIMIBsr ! Je suis actuellement candidate pour devenir conducteur de métro à la RATP, je dois passer le dernier entretien bientôt , et j’aimerai vous demander,svp, si vous accepteriez de me faire découvrir votre métier le temps d’un aller retour à bord de votre cabine?Merci pour votre réponse.
Mimi
21 avril 2015
Custin d'AstréeBonjour,
Je ne suis pas conducteur de la RATP. Ce post était une fiction. Je n’ai malheureusement aucun contact à la RATP.
Je vous remercie néanmoins pour votre message, Mimi !