Il doit être vers midi et demie : l’heure à laquelle les rues vides de ce quartier de bureaux se repeuplent pour la pause du midi. C’est l’heure à laquelle les boutiques de sandwiches « haut de gamme » et les boulangeries, traditionnelles ou non, se remplissent.
Devant certaines d’elles commencent à se former des files d’attente assez importantes. À la queue-leu-leu, des hommes et des femmes en tenue de travail, souvent en tailleur ou en costume trois pièces, généralement assez jeunes, attendent leur tour pour commander leur sandwich-baguette au thon ou jambon-fromage à 5,50 €.
En face de la boulangerie, une sandwicherie franchisée de la firme américaine « Subway ». Là-aussi, la file est importante. La décoration est là pour rassurer : elle est strictement la même quelle que soit la boutique. Des présentoirs en carton-pâte indiquent la promotion du jour ou le tarif étudiant. Bien que la plupart des ventes se font à emporter, il y a quelques places assises, sur des tabourets, façon bar, pour ceux qui veulent consommer sur place. Le comptoir est toujours présenté de la même manière : d’abord on choisit son pain, puis la garniture, et enfin les crudités. La boutique est pleine de monde, mais seule une personne est assise : un homme d’une trentaine d’année, la chemise blanche, la cravate à dominante rouge, le costume sombre, regarde vaguement les passants. Il consomme un sandwich pour lequel il vient d’opter, contenant des tranches de poulet et de bacon reconstitués, de la laitue, et quelques légumes. Pour que la déglutition soit facilitée, le menu proposé par le Subway contient un grand verre de soda en carton plastifié et un paquet de chips nature.
L’homme, visiblement fatigué, termine rapidement son repas, en quelques minutes, comme si un retour rapide à son bureau était nécessaire. Il roule en boule le papier ayant servi à emballer son sandwich, et vide le contenu de son plateau dans la poubelle prévue à cet effet. Il reboutonne ensuite sa veste, met son écharpe et son manteau, enfile ses gants, et sort de la boutique, le pas preste vraisemblablement vers son lieu de travail.
Une fois disparu au coin de la rue, une autre personne, une femme d’une trentaine d’années elle-aussi, prend sa place sur le tabouret, face à la vitrine. Elle aperçoit face à elle, négligemment posé, le portefeuille du monsieur.
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