Il semble que la consternation se soit abattue sur de nombreux commentateurs lors de la dernière publication annuelle du classement de Shanghai. Les universités françaises, en effet, s’y sont retrouvées très loin des prestigieuses Harvard, MIT ou Berkeley américaines. La première française étant Paris-XI devant Paris-VI.
Ce classement peut évidemment être contesté, d’autant qu’un autre classement, celui du Financial Times des grandes écoles européennes, met la France à l’honneur avec l’ESCP Europe et HEC dans le trio de tête.
On remarquera que nos écoles de management tiennent la dragée haute dans ce classement à des universités européennes qui sont le plus souvent généralistes. Ces mêmes universités généralistes qui, elles, battent à plates coutures nos universités généralistes à nous. C’est là toute la conséquence du système double français, qui n’est pas sans avantages, et qui oppose universités souvent publiques et piteusement dotées et grandes écoles chères attirant les meilleurs élèves.
Autre remarque intéressante en parcourant le classement : si la plupart des universités mondiales portent le nom de villes, les universités françaises portent des numéros et sont relativement petites. Aujourd’hui, celle qui peut être considérée dans le monde comme l’université la plus prestigieuse en France, la Sorbonne, n’existe pas : elle n’est qu’un bâtiment. L’université qu’elle abrite est en fait une multitude d’universités séparées et indépendantes.
Cette organisation illisible à l’international l’est aussi difficilement en France et il est peut-être temps de revenir de manière profonde sur la réforme de l’université des années 1970. Elle n’existe pas qu’à Paris : il y a trois universités Aix-Marseille, quatre à Bordeaux, trois à Toulouse, Lille, Lyon et Montpellier, etc. Il semble que la fusion de ces établissements en pôles urbains ou régionaux les aidera à atteindre une taille critique à même de leur donner les moyens nécessaires à leurs ambitions et leur prestige.
Mais c’est aussi à l’État ou aux collectivités (si on leur en donne la possibilité) d’investir massivement dans l’enseignement supérieur, pour faire des universités françaises des pôles reconnus de formation et de recherche. Cependant, nous ne sommes pas non plus forcés de rechercher l’élitisme des universités américaines si chères qu’elles sont réservées à ceux qui en ont les moyens, hormis quelques rares boursiers exceptionnels. En cela, monter dans le classement de Shanghai n’est pas une fin en soi.
6 Responses to “Les universités françaises sont-elles nulles ?”
10 septembre 2011
romain blachierLes critéres sont discutables
10 septembre 2011
Not_pierreOui et non. C’était vrai, bientôt ce sera moins le cas. Il y déjà eu fusion, les 3 Universités de Strasbourg dans une unique Université. Cette nouvelle Université va d’ailleurs fusionner avec l’Université de Haute-Alsace d’ici 2-3 ans.
Une Université pour l’Alsace au lieu de 4 avant. Ce processus arrive aussi en Lorraine (fusion des Universités de Metz et Nancy), à Aix-Marseille, Montpellier et à terme Lille et Bordeaux. Le sujet est en discussion à Rennes et Nantes. Restera Paris, Lyon, Toulouse.
11 septembre 2011
CustinOui en effet le mouvement est lancé, et c’est tant mieux. Mais je ne vois rien venir pour Paris où des universités dont le découpage est illisible à l’étranger sont toujours indépendantes et en concurrence.
10 septembre 2011
StevenLes collectivités territoriales versent parfois déjà de l’argent pour des établissements de l’enseignement supérieur alors que ce n’est pas leur mission et qu’elles ne perçoivent aucune recette fiscale pour cela.
Il faut que l’Etat assume pleinement sa mission, encore faut-il savoir ce que l’on veut, une université « commerciale » de compétition pour bien figurer dans les classements ou une université démocratique et de diffusion du savoir à un maximum de gens (qui n’a jamais empêché pas « l’excellence » par ailleurs) ?
En tout état de cause, il est grand temps de réinvestir beaucoup dans l’université, si la massification est une réalité (et une bonne chose), cela ne s’est pas accompagné de moyens correspondant et ce n’est pas l’autonomie qui changera cela.
11 septembre 2011
CustinTon commentaire parle de deux choses : le financement, et l’objectif.
Pour le financement, il faut évidemment que, si les collectivités financent, ça passe par plus de budget. Mais je ne trouve pas ça incohérent, ça permettrait à des universités d’avoir un caractère régional plus marqué, certaines spécificités qu’un financement centralisé à Paris ne permettra pas.
Pour les objectifs, comme je le dis dans l’article, faire des universités françaises des universités élitistes qui n’attirent que des nantis ne doit pas être un objectif. Il doit y avoir dans chaque université des pôles d’excellence pour ceux qui veulent aller très loin, gagner des médailles Fields et Nobel, etc. Mais il doit aussi y avoir des filières pour ceux qui veulent simplement une formation professionalisante. Je finirais par dire qu’en ce qui concerne le management, les universités auront beaucoup de mal à rivaliser avec les grandes écoles, mais pourquoi pas rapprocher ces mêmes grandes écoles de leurs universités dans les régions (à Paris, je pense que c’est impossible pour les plus prestigieuses qui ont une identité et une reconnaissance propre). Pour couronner le tout, je pense évidemment que cet enseignement, qu’il soit d’élite ou professionalisant, doit être gratuit pour tout, ce qui sera une force par rapport aux universités étrangères.
12 septembre 2011
CGpointSans revenir sur le fond (si les universités américaines regroupent toutes les disciplines, elles les proposent aussi à chaque étudiant quel que soit son cursus — en France, les cursus sont spécialisés, voire imperméables), je trouve cet article très parisien.
Comme l’a dit Not_pierre, les universités en province tendent à se regrouper (c’est le cas dans ma ville, Bordeaux). Et ne nous faisons pas d’illusion : les écoles qui peuvent être concurrencées par l’université (je pense au commerce, management, et ingénierie scientifique) ne se rapprocheront jamais des universités, parce qu’elles ne le veulent pas. Il n’y a guère que les Instituts d’Etudes Politiques et écoles d’architecture qui le font, parce que l’université propose des spécialistes et des compétences dont elles ont besoin, sans que l’université ne propose de formations équivalentes.