Il est un exercice auquel aucun gouvernement ne peut couper avant de faire son budget : les prévisions de croissance. C’est en se basant sur ces données que le ministre du Budget et son compère des Finances peuvent préparer leurs estimations de dépenses, ajuster les rentrées d’argent, donner les enveloppes budgétaires aux différents ministères.
Mais comment établir une prévision de croissance ? En fait il s’agit de tout un art : une surestimation crée en général une hausse du déficit – même s’il ne faut pas dédouaner les autres responsabilités pour autant hein – car les dépenses envisagées ne sont pas couvertes par des recettes suffisantes. À l’inverse, une sous-estimation de la croissance comme en 1999 et 2000 peut entraîner la naissance d’une « cagnotte ».
Le gouvernement n’est pas le seul à calculer des prévisions de croissance : s’il le fait avec l’aide de l’INSEE, des prévisions sont également publiées par le FMI et d’autres organismes qui sont souvent beaucoup moins optimistes que lui. Tapez simplement « prévision de croissance » dans Google Actualités et vérifiez année après année. Vous vous rendrez compte que 1– les journalistes ne sont pas très imaginatifs quand il faut inventer des titres à des articles et 2– que le FMI accuse chaque année le gouvernement de surestimer la croissance.
Mais, pour autant, les gouvernements successifs n’ont pas systématiquement surestimé cette donnée, même si ce fut le cas la plupart du temps (voir graphe). En général, le problème vient du fait que le gouvernement calque ses prévisions de croissance sur la croissance réelle de l’année passée. Il a donc quasi systématiquement un an de retard, que ce soit à la hausse ou à la baisse.
Cette semaine, François Fillon a annoncé que la prévision pour 2011 allait passer de 2 % à 1,75 % ce qui paraît raisonnable. Les prévisions de croissance de nombreux programmes – PS et Villepin par exemple – tablent sur une prévision de croissance de 2 % l’an sur cinq ans. Pour comparer, François Fillon a bénéficié d’une moyenne de 0,37 % l’an, contre 1,74 % en moyenne pour le deuxième quinquennat Chirac et 2,96 % sous Jospin. La moyenne de croissance annuelle depuis 1980 est de 1,86 % l’an. Je suis donc d’avis que tabler sur une croissance supérieure à cette moyenne c’est risquer d’être fortement déçu le jour venu !
3 Responses to “Miroir, ô mon beau miroir, est-ce que ma croissance est la plus belle ?”
26 août 2011
StefOui juste remarque, la moyenne est plus parlante…
26 août 2011
Stat75Intéressant, mais j’ai pas compris « En général, le problème vient du fait que le gouvernement calque ses prévisions de croissance sur la croissance réelle de l’année passée » ni en quoi c’était un problème (il me semble bon de tenir compte de l’année précédente pour ‘inventer’ un nouveau chiffre de l’année suivante non?).
Aussi, desquelles prévisions, s’agit-il ? sachant que le PIB trimestriel est diffusé 4 fois l’an, il peut y avoir jusqu’à 4 révisions du chiffre de croissance par an…
De plus, avec le pacte de stabilité ou la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, il y a aussi des prévisions pour les années n, n+1 qui sont aussi données par le gouvernement. Donc le graphique montre des prévisions à quelles dates ?
Et si on rajoutait les prévisions du FMI, du consensus forescast des économistes, des banques BNP, Banque de France, de l’OFCE, OCDE etc… Est-ce qu’on n’aurait pas pour ces prévisionnistes le même décalage et la même remarque à savoir de « calquer [leurs] prévisions de croissance sur la croissance réelle de l’année passée » ?
26 août 2011
CustinBonnes remarques.
Les prévisions indiquées dans le graphique sont prévisions prises en compte en année N pour le budget N+1. Évidemment, tout au long de l’année, le gouvernement revoit ses chiffres en fonction de l’évolution réelle.
En outre, vous faites bien de rappeler que les prévisions du FMI ne sont pas forcément toujours meilleures, même si elles sont constamment plus prudentes. La prévision économique est une discipline très difficile voire impossible. Il faudrait vérifier si nos voisins s’en sortent mieux que nous.
La moyenne des prévisions sur les 11 années dont j’ai retrouvé l’historique donne un peu moins de 2 %. La moyenne réelle est de 1,23 %. Il y a donc surestimation quasi systématique qui pose plus de problème qu’une sous-estimation.