« Valeur travail » : concept magique né de la chute de l’Ancien Régime qui opposait la masse du peuple travailleur à l’aristocratie oisive. À l’origine exploitée par Marx, la valeur travail est aujourd’hui dans la bouche des rentiers, retraités et fils à papa qui y voient un moyen de donner une valeur morale à une source de profits.
En quelques années, ceux qui détiennent le capital ont réussi à faire croire que leur réussite tenait de leur travail. En réalité, les milliardaires le sont majoritairement parce qu’ils sont issus d’une famille riche ou héritiers, et compression des salaires n’aidant pas, l’immense majorité des travailleurs est condamnée à vivre des fins de mois difficiles pendant toute la durée de leur vie.
Alors, pourquoi le travail devrait être une vertu ? Longtemps, le travail a plutôt été vu comme un mal nécessaire, réservé aux basses gens, au contraire de l’art. Étymologiquement, le mot travail trouve d’ailleurs une origine commune au mot torture : rien de bien réjouissant. Nombreux sont les philosophes qui, de l’antiquité à nos jours, ont considéré le travail comme une référence très secondaire, très loin de l’idée d’épanouissement du corps ou de l’esprit.
Peut-être qu’aujourd’hui la sanctification du travail est une des causes des soucis que nos économies rencontrent. À dessein ou non, le travail est souvent confondu avec une activité rémunérée. Alors que les progrès technologiques font qu’il n’est sans doute plus nécessaire de faire travailler toute une population à plein temps, celui qui se place en dehors du marché du travail est mis au ban de la société. Pourtant, il est tout aussi possible s’épanouir, étant utile à la société, via une activité non rémunérée : art, réflexion, création : ces choses font progresser le monde mais ne sont pas forcément rentable.
En résumé, la valeur travail telle qu’actuellement défendue par la plupart de la classe politique est avant tout une apologie de la rentabilité. Dominique de Villepin est, à ce titre, le premier homme politique d’envergure à avoir introduit dans le débat le revenu universel, qui permettrait à chacun de subsister sans avoir forcément un emploi rémunéré. Je suis persuadé que ce sujet reviendra sur le devant de la scène, à force de crises et de situations économiques tendues.
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