Il y a quelques jours, l’encyclopédie en ligne Wikipédia affichait, sur sa version américaine, une page noire, en signe de protestation contre deux lois censées lutter contre le piratage sur Internet appelées PIPA (Protect Intellectual Property Act) et SOPA (Stop Online Piracy Act).
Fruits d’un intense travail de lobbying et de millions de dollars investis dans une grande campagne adressée directement aux parlementaires américains, ces deux lois auraient eu des conséquences très graves sur la liberté sur Internet dans le monde : surveillance a priori des communications, possibilité de fermer des sites sur simple dénonciation d’ayants-droits, immunité en cas d’abus de pouvoir, blocage partout dans le monde des sites incriminés et de leurs sources de revenus, interdiction de liens vers les sites incriminés, etc.
Les parlementaires U.S. ont travaillé d’arrache-pied pendant plusieurs mois pour rédiger ces deux lois, fruit d’un travail collaboratif entre les partis démocrate et républicain, pourtant rivaux. Les lois étaient sur le point d’être adoptées à l’unanimité.
Pourtant, la mobilisation citoyenne a dépassé toutes les espérances : des millions de personnes ont signé une pétition en ligne, les grands du web comme Google, Facebook, Wikipédia, Craigslist, plus des dizaines de milliers de web-entreprises ou associations ont protesté, Eric Schmidt, patron de Google, ayant même menacé de désobéissance civile en cas de vote des lois. Début 2012, en quelques jours, le camp des soutiens aux lois PIPA et SOPA connaît de nombreux revirements, dont le président Obama lui-même. Aujourd’hui, les propositions de lois sont suspendues et de nouvelles négociations sont ouvertes.
Au-delà de la simple question du piratage sur Internet, on peut légitimement se poser la question de l’efficacité de la démocratie représentative telle qu’exercée actuellement aux États-Unis et en Europe occidentale : que des heures de travaux parlementaires se soient faits sous la pression de groupes industriels puissants, que deux lois aient failli être adoptées à l’unanimité alors qu’elle font l’unanimité citoyenne contre elles, qu’il ait fallu des actions populaires pour faire reculer le pouvoir politique montre que nous avons un réel problème : confié à un trop petit nombre, confié à des gens qui sont trop loin des réalités, confié à des personnes sous influence, le pouvoir est détourné de son but premier : servir le peuple. Cet événement est une preuve de plus de l’échec d’un système qui n’a de démocratique que le nom.
1 réponse to “Le fiasco PIPA et SOPA signe-t-il l’échec de la démocratie représentative ?”
25 janvier 2012
DavidJe ne pense pas que ce soit un fait nouveau . Je pense qu’on ne mesure pas assez la portée de ce que disait Tocqueville sur la démocratie. Mais surtout, je pense que la démocratie participative ne fonctionne pas PARCE QUE le peuple ne s’y intéresse pas (voter une fois tous les 5 ans ne change quasiment rien). On ne parle pas assez de ce peuple qui s’en bat les steak et qui « consomme » l’état comme si c’était un prestataire de service. Comme s’il (le peuple) n’avait pas de devoirs. Combien connaissent le nom de leur député ? Combien est déjà allé à une réunion de quartier ? ça personne n’en parle. Trop de gens ont intérêt à garder ce statut quo… Tiens, je vais écrire un billet la dessus tiens.
Mais il est désolant de constater que ce n’est que quand les lobbys de l’industrie de l’entertainment paient des millions de $ (autour de 94 millions je crois) que Républicains et Démocrates font du Bipartisanship.
A suive avec The State Of the Union tout à l’heure