Alors que Londres est à feu et à sang, alors que la vieille Europe ne sait plus si elle pourra rembourser ses créanciers encore longtemps, alors que les États-Unis doutent de leur puissance, il est quand-même des gens heureux sur terre, du moins, si l’argent contribue au bonheur, ce sont les transfrontaliers qui travaillent en Suisse.

Le principe est simple : habitez et dépensez votre argent dans un pays de la zone euro, et faites-vous payer votre salaire en francs suisses. Vous serez augmenté année après année sans même avoir à négocier avec votre patron ! Et quelle augmentation !

Quelqu’un qui avait un salaire net de 3 000 francs suisses (CHF) au 1^er janvier 2008 pouvait dépenser 1 822 euros. Pour le même salaire suisse en 2009, il pouvait dépenser 2 010 euros soit une hausse de plus de 10 % de son pouvoir d’achat sans aucune hausse de salaire ! Et ça continue : au 1^er janvier 2010, il pouvait dépenser 2 024 euros et au 1^er janvier 2011 son salaire de 3 000 CHF pouvait être converti en 2 379 euros soit une hausse de près de 18 % en un an !

Cette appréciation du CHF s’est accélérée en 2011, pour atteindre une hausse de près de 22 % aujourd’hui. Globalement, depuis 2008, le franc suisse s’est apprécié de près de 60 % face à l’euro. Peut-on dire ainsi que les transfrontaliers, qu’ils soient Français, Allemands, Autrichiens ou Italiens, sont les plus heureux du monde ? C’est sans compter sur le fait que cette tendance lourde depuis quelques années peut s’inverser. Si le CHF s’est apprécié par rapport à l’euro depuis 2008, c’est parce que la situation financière mondiale est incertaine et la monnaie de la Confédération fait, comme l’or,  figure de valeur refuge.

Une stabilisation de la situation mondiale et un renforcement de la Zone Euro pourraient changer la donne et, pour le coup, mettre en difficulté les mêmes transfrontaliers. Mais ils auront toujours la possibilité de basculer leurs achats du côté suisse de la frontière. Il y a donc des gens à qui la crise profite, et on ne peut que s’en féliciter pour eux. Reste à savoir qu’est-ce qu’on fout à Paris où les salaires n’augmentent pas et où les prix explosent…